Jurisprudence « Uber »: A quelles conditions le contrat entre un chauffeur et une société mettant en lien ce dernier avec des clients peut-il être requalifié en contrat de travail ?

L’article 1353 du Code civil pose comme principe que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.

Par principe il appartient à celui qui prétend avoir la qualité de salarié d’apporter les éléments permettant de caractériser l’existence d’un contrat de travail. A contrario, le prétendu employeur doit démontrer l’absence d’un contrat de travail.

La question de la requalification en contrat de travail des chauffeurs liés contractuellement à la société UBER s’est posée récemment.

En l’espèce, un chauffeur avait conclu un contrat avec la société UBER afin de transporter des passagers en voiture, les clients étant mis en relation avec le chauffeur par la plateforme UBER.

Le chauffeur avait loué un véhicule auprès d’un partenaire de la société UBER et s’était immatriculé au répertoire SIRENE an qualité d’indépendant.

Quelques mois plus tard, la société UBER désactive le compte du chauffeur de la plateforme. En d’autres termes, il ne pouvait plus être mis en relation avec des clients via la plateforme. Le chauffeur d’est retrouvé dans l’impossibilité de travailler.

Le chauffeur saisit alors le Conseil de prud’hommes d’une demande de requalification avec rappels de salaires et une demande d’indemnités de rupture.

La Cour d’appel de Paris fait droit à la demande du chauffeur et requalifie la relation entre ce-dernier et la société UBER en contrat de travail.

Pour la Cour d’appel la relation contractuelle devait être requalifiée en contrat de travail pour les motifs suivants :

  • en signant un contrat avec la société UBER, le chauffeur s’est retrouvé intégré dans un service créé et organisé dans son intégralité par la société UBER,
  • les itinéraires étaient imposés au chauffeur avec pénalités si le chauffeur ne respectait pas l’itinéraire imposé,
  • les tarifs étaient imposés,
  • la destination finale de la course n’était pas nécessairement connue à l’avance par le chauffeur,
  • le chauffeur ne pouvait se constituer une clientèle propre,
  • le chauffeur ne pouvait pas choisir ses courses,
  • le chauffeur pouvait être déconnecté temporairement par la société UBER dans l’hypothèse où il refuserait trois courses,
  • le chauffeur pouvait être exclu de la plateforme.

La société UBER forme un pourvoi en cassation.

La Cour de cassation rappelle que « le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. ».

Selon la Cour de cassation, la relation contractuelle entre un chauffeur et la société UBER peut être requalifiée en contrat de travail, les conditions de travail ayant pour conséquence de créer un lien de subordination entre les parties.

Dès lors, le chauffeur ne peut avoir la qualité de travailleur indépendant et doit être reconnu comme étant un salarié.

Cass. soc., 4 mars 2020, n°19-13.316

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